trouble comes at night (kazuki)

|	trouble comes at night ; @yoshimitsu kazuki

Il n’y a que tranquillité dans l’air et sérénité en vue pour le fils Kyudo, qu’une soirée entre lui et son thé qui infuse entre ses doigts. Il a depuis le coucher du soleil, abandonné les dossiers ouverts sur son bureau pour mieux se perdre dans sa cuisine. Il n’avait pas envie de travailler ce soir, pas envie de se plonger dans les drames. Il y a du relâchement dans les rangs ces derniers temps, mais rien ne presse. Ça peut attendre demain, au moins, car ce soir Shōhei a mal au crâne. Ce soir il aimerait juste savourer son thé et se griller les neurones devant la télévision, comme n’importe qui, mais ça n’a aucun effet sur lui. Il ne regarde même pas l’écran, ses pensées à milles lieues d’ici et en ébullition malgré la fatigue qui l’assomme. Les conflits internes au sein du clan commence à peser sur sa conscience et l’inquiéter, du moins professionnellement parlant. Il craint le jour où les erreurs seront irréversibles et où même son expertise ne pourra plus les couvrir. Il craint d’un jour perdre le contrôle des événements et il en connaît très bien l’origine. Erin. Difficile de retenir un tel homme, surtout lorsqu’on lui donne les pleins pouvoirs. Il ne veut pas de ses responsabilités et s’en défend auprès de son père plus que de raisons, mais il ne nierait pas avoir un certain désir proche. Avoir la mainmise sur toutes les décisions importantes sans pour autant porter le titre de grand chef, une position qu’il a atteint et dont il se contente, qu’on le croit ou non. Alors ce soir, il se vide l’esprit en parcourant les dernières tendances sur les réseaux et c’est une distraction qui lui aura fait perdre presque une heure sans qu’il ne s’en rende compte. Ces choses futiles sont vraiment dangereuses, pense-t-il alors qu’il pose l’objet sur la table basse et se lève pour se rendre à la porte. Sans l’intervention d’un mystérieux invité, le Kyudo n’aurait pas levé le nez de son téléphone et il y verrait presque une libération. Pourtant, il observe l’entrée avec confusion et une méfiance certaine parce qu’il n’attendait personne. On l’aurait contacté si sa compagnie était requise, mais il est rare qu’on s’invite chez lui à pareille heure et la première personne à laquelle il pense, est son père. Ou peut-être sa mère ? Toujours est-il qu’il n’est pas en tenue pour accueillir qui que ce soit et qu’il attrape une veste en soie pour minimiser l’impact : une belle pièce noire ornée de carpes koï, traditionnelle et distinguée. Il ouvre la porte et ce qu’il trouve derrière le rend muet. Il hausse un sourcil et les secondes filent, le silence persiste. « You've got the wrong house, » sont les premiers mots qu’il lui balance au visage et le remord n’a pas sa place sur le sien, impassible malgré la détresse visible sur les traits de son invité surprise. Il le reconnaît, étrangement. Il l’a déjà vu avec Hotaru quelquefois, mais rien qui ne justifie sa présence et ça le déroute. Il devrait le renvoyer et lui fermer la porte au nez, mais Shōhei n’est pas forgé ainsi et il s’éloigne en laissant la porte ouverte. « Come in, it's cold outside. » Shōhei et ses bonnes manières, gentleman en toutes circonstances et pas si salaud, malgré les apparences. Puis, il ne peut ignorer sa curiosité quant au motif de sa présence. Pourquoi venir ici lorsqu’il doit sûrement trouver plus de réconfort auprès d’Hotaru ? Pourquoi n’est-il pas chez eux, d’ailleurs ? Les questions se bousculent, mais rien ne vient perturber son calme olympien et sa voix est sûre, traînante lorsqu’il s’exprime à nouveau. « Did something happen? I’m kinda confused… Kazuki, it is? » Il s’attarde sur chaque mot, chaque syllabe et le ton n’est ni menaçant ni irrité. La présence ne le dérange pas autant qu’il le pensait non, mais au contraire l’intrigue. « You look scared and not because of me. Why are you here, kid? » Il incline la tête en croisant les bras et sur son visage jusque-là sérieux, se dessine un sourire encourageant. Qui est-il pour rejeter la compagnie, même inopportune ?

|	trouble comes at night ; @Kyudo ‌Shōhei

Bruit. Du bruit. Ça résonne encore violemment dans ses oreilles. Ça le terrifie encore. Toujours. Gamin qui fait le fier, mais la fierté qui a disparu dans son attitude. Tête basse, ses cheveux blonds à peine coiffés, et surtout rien pour marcher le regard droit. Il erre Kazuki. Il erre, n’osant même pas prendre un taxi. De toute façon vu sa dégaine, pas sûr qu’on l’accepte. Mis dehors en pleine nuit, ou alors a-t-il fui, il ne sait plus trop Kazuki, tout ce qu’il sait c’est qu’encore une fois il n’a plus de foyer, plus d’attache. Erin veut sans aucun doute sa mort et Hotaru … Hotaru doit le détester à l’heure qu’il est. Amitié fragile, les déceptions sont faciles. Objet de déception, rien de nouveau. Et derrière ses paupières baissés, les cils ourlés de larmes, la vision reste cauchemardesque. Eiji. Mort. Mort. Mort. Et son sang encore sur lui. Cadavre qu’il a serré contre lui, demandant des secours. Idiot de Kazuki. La mafia n’est pas son monde. Des œillères face à ces mains tendues. Des œillères sur leur vrai nature, parce qu’au final quelqu’un voulait bien de lui. Idiot. Réalisation amère, et le poids de ce corps encore contre sa cage thoracique. Il a du sang sur les mains, il a du sang sur son tee-shirt, gamin en pyjama. Lorsqu’il a été se laver les mains dans les toilettes publiques, il a prié, prié, pour qu’on ne le remarque pas. Le sang qu’il a frotté sur sa peau pour que ça disparaisse, pour que ça ne soit qu’un rêve, un horrible cauchemar. Mais le miroir lui renvoie son teint cadavérique, ses yeux rougies de larmes, et des ombres réelles. Que ça ne soit qu’un cauchemar, s’il vous plait. Mais Eiji est mort. Mort et on n’a rien pu faire. Eiji est mort, Erin veut sa mort, Hotaru ne veut sans doute plus de lui à la maison. Et il erre Kazuki. Âme en peine, lorsque la ville commence à s’endormir. Âme à la dérive, qui marche, marche, marche. Nul repos pour lui. Jusqu’à un bâtiment qu’il connait. Il a accompagné Hotaru une fois ou deux ici. Chez son cousin. Et c’est dans un automatisme étrange qu’il cogne contre la porte, sonnette dédaigné. Il n’aurait pas dû venir ici. Il aurait dû trouver refuge chez Yuuto, mais les traces de sang sur son tee-shirt l’aurait effrayé. C’est effrayant après tout. Il n’aurait pas dû venir ici. Et la remarque le glace. Le fige, regard apeuré qui se baisse et ses mains qui se tordent. L’hystérie de l’angoisse qui est encore trop palpable, là dans sa gorge. Prête à exploser. Des larmes qui sont au coin de ses yeux, et des excuses amères étouffées, il ne s’exprime que par le silence Kazuki, jusqu’à ce que Shōhei, c’est son nom, le laisse rentrer. Comme un animal apeuré, il le suit jusqu’au salon, conscient qu’il a les pieds sales, absence de chaussures. On dirait vraiment un gamin des rues. Avec son tee-shirt sale, ses jambes à l’air, ses pieds noirs. Hochement de tête lorsqu’il se rappelle de son nom, il aimerait pouvoir dire ce qu’il se passe, pourquoi il est aussi effrayé. Mais il revoie le regard d’Hotaru, mais il revoie la fureur d’Erin, et les mots se lient, se brisent contre ses lippes dans un geignement presque animal. « There … Ov’there … A … Erin … Erin had … He … » Angoisse. S’il parle, Erin va le tuer. Même si c’est son cousin, il va le tuer. Il en est sûr. Angoisse. Et la gorge qui se referme, l’impression d’être pris au piège. Erin … Erin, il veut le tuer. Et Kazuki, il ne veut pas mourir. Non. Juste non.