une bière des haltères, le retour. (ft. tomoko)

Autant dire que la première fois qu’il avait croisé Tomoko depuis son arrivée à Tokyo n’était pas restée inaperçue dans la mémoire de Wooyoung. Cette demoiselle qui avait réussi à l’arroser par sa maladresse ; une maladresse qui commençait à lui devenir habituelle, à vrai dire, à se demander si elle ne contrebalançait pas sa chance à lui. Il n’avait jamais vraiment souffert de cette maudite « loi de murphy » dont tant de gens parlaient en s’en plaignant, ou alors pas dans la mesure qu’on pourrait imaginer, à croire qu’il était né sous une bonne étoile qui lui permettait de ne pas finir comme l’un de ces pauvres bougres qui recevaient jour après jour les conséquences d’un karma qu’ils avaient dû enfoncer dans une vie antérieure. « Ça va très bien, merci. » Mais ce qui l’intéressait plus, c’était la suite de la question : il fallait dire que Wooyoung n’était pas retourné là-bas par hasard. Tomoko avait accroché son regard, son attention, et même s’il savait que sa petite amie l’attendait sagement, il ne pouvait s’empêcher de lui tourner autour.

C’était mal, il le savait, mais il savait également qu’il était un petit ami digne, et que même s’il fréquentait une fille comme Tomoko, cela n’irait pas plus loin. Il n’avait pas envie de se retrouver dans la situation du petit ami infidèle et honteux que certains se plaisaient à décrire à coup de menaces et d’insultes. « C’est que tu fais bien ça. » Ou qu’elle était mignonne, aussi. « Je te dirai ça. On voulait y retourner en plus, puis comme ça on pourrait se voir un peu plus. » Charmeur ? Non, ce n’était pas son genre… Ou peut-être que si, justement ? Il ne put s’empêcher de sourire en reposant les yeux sur la jeune femme. « T’as déjà un verre ? Je t’offre quelque chose ? » Ce n’était pas une mauvaise idée, si ? Ils pouvaient bien discuter. « Faudrait que tu me fasses faire un tour de la ville, un de ces jours. Je suis là depuis quelques mois et j’ai l’impression de ne rien connaître. » Encore une fois, du temps pour eux… Une pente bien dangereuse sur laquelle il s’engageait sans le moindre soupçon.

la première chose à laquelle tomo pensa fut de ne surtout pas faire de bourde en la présence du garçon et la seconde était qu’il avait un sourire tout à fait charmant. ou alors dans l’autre sens. toujours est il que ces deux informations tournaient en boucle dans son esprit tandis qu’elle amorçait une conversation avec wooyoung avec tout le naturel qu’elle avait en stock à ce moment. soit une quantité plutôt médiocre mais qui semblait faire l’affaire pour le moment. le plus compliqué était de garder une expression faciale descente lorsqu’il faisait allusion à ses qualités de maid – il avait à peine survolé le sujet mais pour la jeune femme c’était déjà beaucoup. à vrai dire un filtre rose pastel venait recouvrir ses yeux à mesure de son cher senpai parlait. « mon manager dit que ma maladresse plait beaucoup aux habitués. » elle rit un peu nerveusement. qu’il n’aille pas non plus s’imaginait qu’elle retirait une certaine fierté là-dedans mais elle n’allait pas non plus s’en plaindre. c’était bien la première fois que sa gaucherie lui servait à quelque chose de positif. habituellement on la trouvait mignonne mais désespérante, là tomoko était adorable – il y avait clairement une histoire de fantasmes peu recommandables derrière tout ça mais elle feignait l’ignorance pour s’assurer des nuits tranquilles. « je peux pas te promettre de ne rien renverser mais j’essaierais de faire ça avec la boisson d’un autre. » tomo ne savait pas si c’était triste à pleurer ou une preuve de maturité d’assumer à ce point ses maladresses.

si elle était incroyablement empotée, wooyoung, quant à lui, semblait avoir un sens de l’observation déplorable. ou alors il ne faisait aucun effort. comment avait-il put rater le verre que tomoko tenait solidement à deux mains de peur de le faire tomber ? « j’ai déjà fait le plein. » elle fit tanguer de gauche à droite sa pinte, ce qui ne manqua de faire déborder le liquide et de faire atterrir quelques goutes sur ses doigts, pour qu’il la voit. « mais je vais avoir besoin d’autres verres pour te rattraper. » peut être qu’il avait d’autres projets pour sa soirée que de rester avec une gamine qu’il croisait de temps à autres mais tomo ne se souciait pas de ça. c’était lui qui était venu lui parler après tout, elle se contenterait seulement d’essayer de l’accaparer le plus longtemps possible. même si elle ne croyait pas vraiment en ses capacités de séduction – ce mot étant rarement associé à son nom. « c’est normal c’est super grand. je croyais avoir beaucoup visité séoul mais en écoutant parler les autres j’ai l’impression d’être passée à côté de la moitié de la ville. mais je me ferais un plaisir d’être ton guide perso. » à chaque fois qu’elle tentait une approche la jeune femme était automatiquement embarrassée par ce qu’elle disait. alors pour masquer un sourire un peu trop fier pour ne pas être flippant, elle plongea son nez dans sa bière. pas besoin de faire un discours pour vous dire qu’elle ne put pas boire plus d’une gorgée avant que son verre lui échappe des mains et termine sur ses chaussures. « MAIS PUTAIN. » une autre chose qu’elle avait laissé s’échapper. « bon. pour une fois je t’ai pas arrosé. » dit-elle sur un ton blasé. elle souffla fort du nez faisant voler sa frange rouge. elle allait l’avoir finalement son verre offert par senpai.

Citation :

réussite : tu finies ta bière toute seule comme une grande
échec : senpai va pouvoir t'en offrir une toute neuve :)))))

cimer le tirage au sort:

Ah, Tomoko. Wooyoung aurait pu en dire beaucoup de bien, s’il s’était laissé céder à la tentation qu’elle représentait. Mais non, évidemment, il était un homme tellement bien que jamais il n’aurait osé ne serait-ce qu’imaginer sa vie avec une autre femme que sa charmante petite amie… Ce qu’il pouvait être idiot à se mentir comme il le faisait. Chaque fois que Tomoko entrait dans la pièce, il n’avait d’yeux que pour elle. Comme un aimant attiré par son contraire, il se dirigeait vers elle et cherchait l’interaction, qu’importe combien le danger auquel il s’exposait était grand. Après tout, la jeune femme avait toujours été maladroite. Comme nous le disions, elle était son contraire : lui, qui n’était qu’un être que tout le monde, dans sa famille, considérait comme Monsieur Parfait. Lui qui depuis des années faisait tout ce qui était en son pouvoir pour garder cette image intacte. N’était-il pas évident qu’il chercherait à nier son attirance pour elle ? Il ne pouvait faire autrement, encore moins maintenant qu’ils discutaient et qu’il la trouvait si jolie. C’était le plus mauvais scénario de drama qu’ils auraient pu vivre. « C’est pas étonnant, c’est assez adorable. » Mais à qui mentait-il, en fin de compte ? Il était en premier ligne pour assister à ses propres bêtises. « Oh oui, s’il te plaît, que je puisse en rire cette fois. » Parce qu’il n’en avait pas ri les autres fois, mais il devait bien avouer que recevoir un café brûlant sur les cuisses n’était pas une expérience qu’il aurait recommandée au premier venu. Au contraire, il préconisait de se tenir à l’écart de ce charmant danger public qui avait tendance à changer tout ce qu’elle touchait en cataclysme. Midas avait bien changé, avec toutes ces années.

Wooyoung fut presque triste de voir que la demoiselle avait déjà un verre. Pas qu’il avait quelque idée derrière la tête (ou plus exactement, il ne l’aurait pas avoué, même sous la torture), mais il aurait été heureux de pouvoir lui en offrir un. D’ailleurs, la mine un peu penaude qu’il avait arboré une demi-seconde laissa rapidement place à un sourire radieux. « Je t’offre le prochain, alors. » Et il n’était pas question de discuter, évidemment. « Quel honneur ! J’espère que c’est guide perso ET privilégié. » Mais nous n’allions (évidemment) pas faire de commentaire sur le fait de s’approprier les gens alors qu’il était en couple. Non, Wooyoung, absolument aucun commentaire. À la place, concentrons-nous sur les faits, à commencer par ce verre qui avait miraculeusement (car à ce point, il fallait clairement parler de force mystique, c’était impossible autrement) glissé des mains de Tomoko pour s’écraser au sol. Wooyoung, d’abord surpris et choqué, se couvrit la bouche d’une main avant de s’empêcher de pouffer. Non, il ne pouvait pas rire. Pas maintenant. « Aaaah. » Il regarda autour de lui, puis considéra la flaque qui, dans le fond, n’était pas très importante. Pas vu, pas pris, il glissa son bras autour de celui de la jeune femme pour l’entraîner avec lui un peu plus loin. « Bon bah, je peux t’offrir un verre maintenant, du coup ? » Et évidemment, elle ne pouvait pas dire non. « Tu buvais quoi ? »

diable ce qu’il pouvait être charmant. même lorsqu’il se moquait de sa maladresse, wooyoung n’en restait pas moins plaisant à bien des égards. tant et si bien qu’il frôlait la perfection aux yeux de la petite tomoko qui se laissait facilement séduire par quelques sourires – et quel sourire il faut bien le dire, et des paroles bien choisies. jamais elle n’avait autant apprécié entendre dire qu’elle était adorable que dans la bouche du garçon. il pouvait la traiter de petit animal qu’elle serait tout de même conquise et même si elle ne s’attendait pas à grand-chose, tomo se laissait volontiers berner. elle préférait profiter de sa délicieuse présence sans pour autant s’imaginer qu’il l’enlèverait sur un cheval blanc pour lui conter fleurette et plus si affinités. la jeune femme ne perdait pas le nord mais savait profiter des bonnes choses de la vie lorsqu’elles se présentaient à elle sous une apparence aussi agréable. cela dit elle ne tarda pas à faire diversion quand il fut question de son travail. wooyoung pouvait répéter mille et une fois qu’il la trouvait adorable qu’elle continuerait de se flageller pour le terrible incident du matcha latte. tomoko avait nullement besoin qu’il retourne le couteau dans la plaie car pour lui elle resterait à jamais la gamine maladroite qui lui avait ébouillanté les cuisses.

oui, qu’ils parlent d’alcool et de visiter tokyo. en voilà une bonne idée. d’autant plus qu’elle se réjouissait de voir que ses maladresses ne l’avait pas fait fuir et même qu’il en redemandait encore. peut-être le regretterait-il lorsqu’il ne serait plus saoule le lendemain. elle connaissait l’étendue de sa bêtise et ne serait même pas choquée si le jeune homme trouvait une excuse pour annuler sa visite privée. « qu’est-ce que tu entends par privilégié ? » tomoko ne se faisait aucune illusion sur ses intentions mais ça ne l’empêchait pas de gratter un peu. qui était-elle pour s’en priver alors qu’un si joli garçon venait la tenter ? elle n’était qu’une pauvre erre parmi tant d’autres. faible face aux charmants des hommes. sans mentir, elle était prête à boire d’une traite son verre s’il n’était pas aussi gros. juste pour que wooyoung lui en offre un plus vite – toujours la même histoire de faiblesse et de charmes masculins. karma moisi ou force divine, quelqu’un quelque part, avec des intentions questionnables, avait entendu son désir. la gravité gagna une fois de plus son combat contre la demoiselle qui fit tomber sa bière comme la bonne grosse empotée qu’elle était. elle resta quelques secondes à regarder, en proie à tout le dépit du monde, l’énième catastrophe qu’elle venait de créer. ses baskets pastels n’avaient pas su échapper au tsunami de bière et elle pouvait déjà sentir la boisson s’infiltrer dans ses chaussettes. un pur bonheur. ce fut assez pour lui faire oublier qu’elle venait encore de se ridiculiser devant son cher senpai. l’oubli fut de bien courte durée. voilà qu’il se mettait à lui faire croire qu’ils étaient dans un drama. tomo le regarda avec de grands yeux ronds alors qu’il l’attirait vers lui – bon c’était plus vers un autre endroit mais laissez la rêver nom de zeus ! elle battit des cils. lui offrir un verre ? ah oui en effet. elle resta muette en écoutant les battements sourds de son cœur. « u-une bière. mais je crois que j’ai besoin de quelque chose de plus fort. » pour se remettre de ses émotions. « pour oublier mes bêtises. » elle rit un peu, cherchant désespérément à se détendre à nouveau.

Mais où était donc la petite voix de l’esprit de Wooyoung, quand il en avait besoin, pour lui rappeler qu’il ne devait pas tourner autour d’une demoiselle comme Tomoko alors qu’il était officiellement en couple avec une autre ? De toute évidence, cette petite voix avait près un billet pour les Maldives sans se soucier de la pandémie mondiale et avait déguerpi sans perdre de temps, car elle n’était pas dans les environs, et l’esprit de l’étudiant vaquait à ses occupations sans la moindre tutelle. Un grand malheur, mais on se garderait bien de déterminer pour qui. Lui ou elle ? Ou encore cette autre ? La dernière option, sans doute. Celle qui découvrirait un jour que son petit ami si respectable était en train d’imaginer offrir un verre à une fille qu’elle ne connaissait pas et qui, à tous les coups, se ferait assommer par la nouvelle.

Parce que c’était la vérité, dans le fond. Chaque seconde qui passait attirait Wooyoung vers Tomoko, comme si elle n’avait été rien de plus qu’un astre à la force de gravitation si puissante qu’il ne pouvait résister à l’envie de la fréquenter. C’était mal, oui. C’était incorrect, peut-être. C’était assurément une mauvaise idée, et pourtant qu’elle était délicieuse, cette idée.

Voilà qu’il reprenait la parole sur ce ton charmeur qui le caractérisait, qu’il adoptait à chaque fois qu’il essayait de se faire bien voir, d’attirer l’attention sur lui et sur ses bonnes actions. Oh, qu’il était stupide, quand il s’y mettait. Fou de penser qu’on l’aimait pour ce qu’il était, et non pour l’image qu’il donnait aux autres. « J’entends que tu ne guides que moi, évidemment. » Un léger rire fila entre les lippes de l’étudiant. « Pourquoi, tu as beaucoup de personnes qui attendent pour profiter du Tomoko-GPS ? » Il fallait qu’il apprenne une bonne fois pour toute que l’humour n’était pas son plus grand talent, mais pour l’heure, il allait plutôt se contenter de boire.

C’était pour cela qu’il était venu, après tout. Boire, boire, boire et faire la fête. Voilà bien une chose qu’il avait intégrée de ses pairs : il aimait célébrer la fin d’une journée de travail autour d’une bouteille de soju, et c’était tout aussi vrai maintenant qu’il était à Tokyo. Pour l’heure, il était plutôt celui qui arrosait, compte tenu de la maladresse de Tomoko qui, fidèle à elle-même, avait encore fait des miracles. Étaient-ils tels le chat et la tartine de confiture, voués à tourner en rond dans l’espace en attendant que l’une des forces soit plus forte que l’autre : la chance ou la malchance ? Nul ne pouvait le dire. Dans tous les cas, il n’avait pas tardé à l’entraîner avec elle. « Okay, dis-moi ce que tu veux alors. Un truc fort, genre fort comment ? » Il sourit malgré lui. « Fort comme moi ? » Non, Wooyoung, non. « Choisis et je prendrai le même pour moi, je suis d’humeur à boire. » Au cas où personne ne l’avait compris.

aussi charmant qu’il pouvait l’être wooyoung manquait cruellement d’humour. elle avait oublié à quel point il pouvait être gênant par moment. tomoko avait focalisé ses souvenirs de lui sur sa gentillesse, ses sourires et le timbre de sa voix pas ses tentatives de blagues un peu nulles qui procuraient des éclats de rire forcés chez la jeune femme. il était aussi beau qu’il n’était pas drôle. « je te donne  l’exclusivité à condition que tu ne dises plus jamais ça. » évidemment qu’elle mourrait d’envie de faire le tour de la ville en sa seule compagnie mais pas au point de ricaner bêtement à une blague qui ne la faisait pas rire. « t’es bien le seul à vouloir passer du temps seul avec moi. mes amis me demandent rarement de services. je suis trop maladroite pour qu’on me laisse approcher de quoi que ce soit. » c’était tout à fait compréhensible quoi qu’un peu blessant à la longue. la jeune femme essayait toujours de bien faire. ce n’était pas sa faute si l’univers tout entier c’était ligué pour l’empêcher de passer une journée sans accrocs.

cela dit ils n’avaient pas complètement tort comme put en témoigner le verre de bière qui était venu se briser au sol. malgré tout le désappointement qu’elle pouvait éprouver des suites de sa bévue, tomoko ne put s’empêcher, l’espace de quelques secondes, y voir une lueur d’espoir. leur toute nouvelle proximité physique n’était vraiment pas déplaisante et s’il fallait qu’elle casse quelques verres pour y parvenir, tomo pouvait faire ce sacrifice. pourquoi s’inquiéter de sa crédibilité quand un beau garçon volait à votre secours ? elle n’avait jamais retourné aussi vite sa veste vis-à-vis de ses maladresses et c’était bien la première qu’elle y voyait un avantage.

au vu de ses divagations, ingurgiter de l’alcool fort ne semblait pas recommandé mais la jeune femme n’avait pas envie d’être raisonnable et encore moins de rester bloquée pareilles pensées. parce que si dans sa tête c’était la fête du slip c’était loin d’être à l’extérieur. elle restait figée à regarder wooyoung avec de grands yeux bourrés d’incompréhension – avec un peu d’envie quand même aussi, on ne va pas se mentir. elle cligna des yeux. fort comme lui ? elle aurait put grimacer face à la nullité évidente de la nouvelle tentative de blague du garçon mais non. tomoko eut une toute autre pensée et pendant un quart de seconde elle pensa à tâter ses muscles pour voir s’il était si fort que ça. et elle n’avait même pas encore bue. « non vraiment il faut que t'arrêtes avec l’humour. » elle tapota l’épaule de wooyoung avec sympathie comme si elle avait de la peine pour lui et son sens de l’humour – et peut être un peu pour vérifier cette histoire de force. « tequila ? j’aime bien les alcools étrangers. » bien meilleurs que le soju. c’étaient d’autres étudiants en échange en même temps qu’elle en corée du sud qui lui avaient fait découvrir tout un tas de liqueurs dont elle n’avait jamais soupçonné l’existence.

N'était-il pas drôle ? Profondément drôle ? Hilarant ? Wooyoung avait envie de songer que c'était le cas, mais hélas, il se fourvoyait lourdement. « Oh, allez, c'était drôle... » Non, pas vraiment, mais encore une fois, le jeune homme semblait trop borné pour l'admettre. C'est que la majorité du temps, les gens avaient la gentillesse de faire semblant de le trouver drôle. Pourquoi Tomoko se montrait-elle si cruelle envers lui ? Elle le pouvait : elle était jolie, et en plus de tout ça il était facile de parler avec elle. Un sourire était venu aux lèvres du jeune homme. « Ils ont tort. T'es adorable. » Oui, aussi franchement que ça. « Puis t'es jolie aussi, si ça ne tenait qu'à moi, y aurait une ribambelle de mecs devant ta porte, attendant pour te faire la cour, comme dans les pièces de théâtre ! » Et, évidemment, ce genre de propos étaient tout à fait normaux, de la part d'une personne qui n'était pas intéressée par une jeune femme... Tout à fait.

C'est que la théorie commençait à devenir difficile à défendre, quand on voyait la facilité avec laquelle Wooyoung parlait avec Tomoko. Quand on voyait la manière dont il était tactile avec elle. Oh, une certaine petite amie n'aurait pas été heureuse de découvrir que son petit ami se comportait d'une telle façon. Quelle indécence ! Certes, il ne faisait pas grand-chose, mais pour parler d'un manque de fidélité, c'était amplement suffisant. Hélas Wooyoung ne le voyait pas lui-même. Il était bien trop obnubilé.

D'ailleurs, cela ne s'arrêtait pas, car il était déjà en train de tirer la demoiselle à sa suite pour aller récupérer un nouveau verre d'alcool. De l'alcool fort, visiblement. La demoiselle semblait elle aussi avoir un certain intérêt pour la boisson. Il sourit en l'entendant. « D'accord, d'accord, je vais essayer de me tenir... » Mais voilà qu'il riait encore. Un léger rire lui échappa malgré lui. « Okay, on prend ça. » Et il n'avait pas tardé à commander, regardant la boisson arriver avec en prime sel et citron. « Ensemble ? » Oui, ensemble. Un sourire lui vint aux lèvres alors qu'il reposait les yeux sur elle, lui tendant l'un des morceaux de citron et l'un des deux verres.

c’était assez réconfortant de réaliser que ses rires nerveux ainsi que son sourire crispé étaient seulement causés par l’humour plus que bancal du jeune homme et pas par autre chose. tomoko aurait été mortifiée si elle se conduisait comme ces filles timides dont les joues se teintaient de rouge à l’apparition du garçon qui leur plaisaient – les héroïnes de ses shojos favoris donc. wooyoung n’était peut-être pas toujours très drôle mais c’était facile de parler avec lui et il ne se vexait pas pour de petites remarques. un peu plus et elle se mettrait à soupirer d’aise en se disant qu’il frôlait la perfection. seulement le temps filait trop vite pour qu’elle se laisse prendre au jeu de ses propres songes. d’autant plus qu’il ne tarda pas à l’attaquer en complimentant son physique. sans vouloir se vanter, il n’était pas le premier à la trouver adorable et à le lui faire comprendre. on la trouvait à croquer avec son visage de poupon et ses gaffes à répétition. ce qui lui donnait l’impression d’être un mignon petit animal plutôt qu’une jeune fille potentiellement désirable. elle ne voulait pas qu’on la trouve adorable mais qu’on lui dise qu’elle pouvait être séduisante ! jolie ça marchait aussi cela dit. surtout quand cela venait de wooyoung – au diable le sexappeal quand senpai pouvait vous trois compliments. cette fois-ci ses joues rosirent légèrement et elle sentit quelques papillons s’agiter au creux de son ventre. tomoko se serait contentée de lui seul devant sa porte mais malgré tout ce naturel il y avait des choses qu’elle ne pouvait pas dire – mais faire tomber des verres ça elle le faisait très bien et en grandes pompes en plus.

il était grand temps de noyer tous les papillons qui avaient posés leurs valises dans son estomac et l’alcool lui sembla être le meilleur remède – chacun sa logique on juge pas. et puis lorsqu’il buvait wooyoung ne riait pas. non pas qu’il ait un rire désagréable. c’était tout le contraire et tomoko avait beaucoup de mal à se concentrer, c’est-à-dire à ne pas le fixer comme s’il était la huitième merveille du monde, dans ces moments-là. « oui s’il te plait, ça devient très gênant. » elle roula des yeux en souriant ce qui lui donna l’air plus malicieux que jugeur. « t’en as déjà but ? j’ai découvert ça en corée pendant mon échange. » ce n’était très intéressant mais ça avait le mérite de combler la conversation le temps que leurs boissons viennent à eux. elle applaudit du bout des doigts en voyant les deux shooters accompagnés de sel et de citron. « wow ça fait longtemps. » commentât-elle en prenant la salière. « donnes moi ta main. » sans trop réfléchir elle prit les doigts du garçon pour appliquer le sel et ensuite faire de même sur sa main. elle lui sourit en reprenant son verre. « c’est parti. » ce n’était pas compliqué : boire la tequila, lécher le sel puis mordre le citron. le morceau d’agrume encore entre les lèvres elle se tourna vers lui pour le regarder. l’alcool devait déjà faire effet parce qu’elle avait de plus en plus chaud et qu’elle pensa pendant un quart de seconde qu’elle aurait volontiers pris la place de ce morceau de citron.

Charmer Tomoko ne semblait pas entrer dans la liste des choses pour lesquelles Wooyoung aurait dû se sentir coupable envers sa petite amie. Pourtant, la majorité des gens étaient probablement d’accord pour dire que c’était totalement inadmissible. Ah, si seulement il n’avait pas été perdu dans le regard de la demoiselle au point d’en oublier la vérité était, évidemment, qu’il agissait comme le plus grand trou du cul que le Japon abritait à ce moment. Certes, pas un trou du cul aussi grand qu’un serial killer qui aurait pu sévir dans la région, mais tout était relatif, et en matière de relation, il figurait en très bonne place, si pas dans le top 3.

Il faut dire qu’alors que d’autres auraient abandonné, il continuait à discuter avec elle, à se montrer toujours plus sympathique, toujours plus avenant, et que certaines personnes n’auraient pas hésité à lui faire comprendre qu’il n’était pas correct, que cela soit envers lui-même ou envers d’autres personnes. Mais évidemment, Wooyoung refusait d’admettre ce genre de choses, considérant qu’il était au-dessus des autres, simplement parce qu’il avait une réputation particulièrement bonne. Il aurait été préférable que cette image reflète la réalité, et n’en soit pas simplement une pâle copie.

« Ouais. J’étais là, t’as oublié ? »

Oh, il n’avait pas grand souvenir de cette soirée… L’alcool n’avait jamais été très tendre envers lui, mais comment aurait-il pu oublier le charmant minois de sa camarade de la soirée ? Il avait posé les yeux sur les shots avant de se laisser faire, tendant la main à Tomoko. Il ne restait qu’à passer à l’action : alcool, sel, citron. Le coin de ses lèvres s’était soulevé quand il avait posé les yeux sur la jeune femme l’instant suivant, et il ne lui avait pas fallu longtemps pour se redresser et s’approcher d’elle, ôtant le morceau de citron qui se trouvait entre les lèvres de la jeune femme du bout des doigts avant d’approcher son visage du sien jusqu’à provoquer le contact de leurs lèvres.

C’est alors qu’il arriva, cet élan de conscience qu’on attendait tous (sauf Tomoko, probablement). Il s’éloigna et reposa les yeux sur elle, puis s’éloigna un peu en secouant la tête. Aurait-il dû commencer à boire de l’eau ? Il était bien trop loin pour s’arrêter en si bon chemin. Il ne pouvait pas faire ça. « Je… Désolé. »

« il y a eu tellement de soirées cette année-là, mes souvenirs sont parfois un peu vagues. » ou comment dire gentiment qu’elle ne pouvait pas se rappeler auxquelles il avait assisté ou non. son niveau en coréen avait considérablement augmenté pendant son échange tout comme ses risques de faire une cirrhose du foie. cela dit elle se souvenait parfaitement de sa première rencontre avec wooyoung. ça ne faisait pas longtemps qu’elle avait débarqué à séoul et en quelques regards il c’était imposé comme le plus beau garçon du campus voir même de la ville – d’après tomo. à l’époque elle n’avait pas eu l’indécence d’imaginer quoi que ce soit avec le garçon. ils ne jouaient vraiment pas dans la même league et elle savait déjà se protéger des illusions d’une potentiel romance. ce n’était jamais allé plus loin que quelques regards en coin et de retour à tokyo elle était passé à autre chose. ce soir-là c’était un peu plus compliqué. il n’y avait personne pour surveiller et commenter leurs faits et gestes. wooyoung semblait encore plus sympathique – sur de nombreux plans, que dans ses souvenirs. si la jeune femme s’autorisait quelques divagations elle se promit, essayer serait plus approprié, que dès le lendemain elle n’attendrait rien de son amitié avec le beau coréen.

cette promesse tournait en boucle dans sa tête tandis qu’une bombe chaleureuse venait d’exploser dans son ventre – l’alcool bien évidemment. elle était tellement hébétée par l’image de wooyoung qu’elle resta là, comme une idiote, son morceau de citron entre les lèvres à le regarder. son imagination lui jouait de vilains tours alors qu’il semblait se rapprocher. tomoko se répétait que c’était son imagination rendue affreusement frivole par l’alcool – rappelons qu’elle n’avait but que quelques gorgées de bière ainsi qu’un shooter, qui lui donnait l’impression qu’il allait… non quand même. il était de plus en plus proche et semblait vachement déterminé. en proie à une violente panique elle ne sut quoi faire lorsqu’il lui retira son quartier de citron. elle se faisait des films. son visage était si proche qu’elle put sentir son souffle liquoreux glisser contre sa peau.

wooyoung senpai était en train de l’embrasser.

ce fut bien trop rapide à son gout. elle n’avait pas eu le temps d’en profiter. la jeune femme était restée figée. elle n’avait même pas fermé les yeux ! un baiser fugace, comme une caresse brûlante. la sensation ne voulait plus quitter ses lèvres. bien sûr elle ne compris rien à ses excuses. s’imaginant qu’il s’excusait de l’avoir embrassée sans prévenir. pauvre petite tomoko si loin de la vérité. « c’est pas grave. » dit-elle d’une voix douce en se mordant la lèvre – parce qu’elle n’était pas contre un deuxième round. « ça ne me dérange vraiment pas tu sais. » elle fit un pas vers lui avec un petit sourire en espérant qu’il comprenne qu’elle n’était pas contre l’idée de recommencer. elle en mourrait d’envie même alors qu’elle dévorait des yeux les lèvres du garçon. elle n’était juste pas assez entreprenante pour se jeter à son cou.