美しい棘 (giichi)

((ootd)) - tu sors du travail tôt, pour une fois. t'as envie de profiter des derniers rayons du soleil sur la capitale. tu détestes bronzer, tu déteste ne rien faire, alors c'est rare de te voir sortir sans but comme ça. et puis, faire un tour dans un parc seule, ce n'est si drôle que ça finalement. tu ne peux pas t'empêcher d'envier les couples, les familles et même les amis qui se baladent près de toi. ils ont de grands sourires sur leurs faces d'abrutis et tu voudrais les leur faire ravaler. leurs vies sont super nulles, la tienne est bien remplie. c'est juste pour ça que tu es seule et qu'ils sont avec une tripotée d'imbéciles. tu finis par en avoir marre, tu rages un peu et tu retournes te perdre dans la jungle urbaine. finissant devant un petit café qui aurait presque l'air sympa. presque. s'il n'était pas aussi médiocre. tu sais déjà que tu vas payer ton café trois fois rien, c'est ça d'aller dans des boutiques de pauvres.

pourtant, tu passes quand même la porte, faisant tinter une douce clochette près de tes oreilles. la lumière se déverse abondamment dans le café. la golden hour n'est pas loin et tout semble déjà baigné d'or. tu t'approches du comptoir, réfléchissant longuement à ce que tu vas prendre. tu esquisses un sourire. un latte au matcha. tu relèves le regard vers le barista et tu sursaute vivement. lui ? tu jettes un regard aux autres clients pour vérifier que personne ne t'ai vue sursauter avant de rire. ah, je comprends mieux pourquoi ce café a l'air plein de rats. garde la monnaie, tiens. tu glisses quelques billets sur le comptoir avant d'aller t'asseoir, un grand sourire ravi sur le visage, sans quitter des yeux le gars. lui, tu l'avais pas oublié. il faut dire que t'avais eu un bleu dans le dos pendant une semaine après votre dernière rencontre. et t'étais pas prête de laisser ça passer. non. vraiment pas.

aujourd'hui semblait être une merveilleuse journée. rien de particulier ne s'était passé mais giichi s'était levé du bon pied ce matin. une première depuis que sa vie était devenue un véritable cauchemar à cause d'internet et que son anxiété lui jouait des tours. il s'était préparé en chantonnant une vieille chanson populaire et avait ouvert le café à 6h30 du matin. la matinée s'était passée sans embûches malgré le fait que les clients se faisaient un peu plus rares ces temps-ci.  giichi allait devoir redoubler d'effort et promouvoir son café de façon plus efficace. un nouveau restaurant venait d'ouvrir au coin de la rue et les gens du quartier y compris ses fidèles clients semblaient curieux. giichi espérait que leur curiosité ne sera que passagère et qu'ils ne déserteront pas complètement son café. les temps étaient déjà assez durs comme ça. il n'avait pas envie de mettre les clefs sur la porte sinon ça sera toute sa vie qui s'effondrait.

fort heureusement, en fin d'après-midi, la fréquentation du café augmenta. des étudiants et des personnes sortant du travail commençaient à remplir les lieux petit à petit. c'est avec un sourire poli et le regard attentif qu'il servait les clients. il essayait de les satisfaire le mieux possible et de leur offrir le meilleur accueil. le service clientèle était ce qui faisait les gens revenir juste après la qualité des produits à la carte. il salue la prochaine cliente sans vraiment regarder son visage, trop occupé à ranger de la monnaie dans la caisse. ce n'est que lorsqu'il relève la tête pour annoncer le prix que leur regard se croisent et le sang de giichi ne fit qu'un tour. la fille du placard. celle qui avait osé menacer sa soeur. et voilà, sa bonne humeur s'était envolée. toutefois, il se devait de rester professionnel. il était au travail et son comportement influençait bien évidemment l'image de son commerce. il prépare la commande de la jeune femme et récupère les billets qu'elle avait laissé sur le comptoir. il aurait pu accepter la somme qu'elle avait déposé mais giichi avait beaucoup plus de dignité que cela. et il voulait aussi faire bonne impression aux clients qui venaient d'observer la scène. et puis ça l'embêtait que certains la regardent de façon émerveillée. ils devaient certainement se dire qu'elle était très généreuse. que malgré son extrême richesse elle restait humble et aidait les petits commerces. giichi n'allait pas accepter cet argent, pas devant tout ce monde. il compte la monnaie qu'il doit lui remettre puis s'avance, café en main, vers sa table. il s'efforce de sourire professionnellement et dépose la tasse devant elle, ainsi que le reste de sa monnaie. 'j'espère que vous apprécierez votre café. et voici votre monnaie.' il croisa le regard d'un client un peu admiratif de son geste. giichi ne le laissait pas paraître mais ça faisait du bien à son ego. il ne roulait pas sur l'or mais il gardait certains principes. 'si vous avez besoin de quoique ce soit, n'hésitez surtout pas.' il espérait qu'elle avale son café le plus vite possible et qu'elle s'en aille aussitôt que possible. sa tête de poupée barbie l'énervait au plus haut point. il retourne derrière son comptoir, essayant d'oublier sa présence.

((ootd)) - tu ne quittes pas le barista des yeux alors qu'il s'occupe de ta commande. un petit sourire satisfait flotte sur tes lèvres quand tu le vois venir vers toi. il t'a même ramené ta monnaie, il faut croire que ce clochard a l'orgueil mal placé. tu ne touches pas à la monnaie, ni au café d'ailleurs. tu observes son cinéma avec amusement, les bras croisés sur ta poitrine. tu lèves un index vers le plafond ah ! est-ce que tu as du sirop de vanille ? tu trempes à peine les lèvres dans ta tasse et tu pousses un petit cri dégouté, tous les regards se tournent vers toi. ça te dérange absolument pas, tu aimes être au centre de l'attention, tu aimes jouer la comédie, tu aimes écraser te ennemis avec cette facilité déconcertante. mais c'est froid ?? c'est avec de la poudre de matcha ou du vomi en plus ? on se demande vraiment vu le goût. tu esquisses une moue boudeuse.

tu recroises les bras sur ta poitrine, tout sourire disparu sauf celui qui te monte aux yeux. finalement tu sais quoi ? j'ai changé d'avis. sers moi un café bien noir. le plus noir possible en fait. puisque ce thé au matcha est carrément imbuvable. puis tu peux récupérer ta monnaie pour le payer. ta voix résonnerait presque dans le petit café. le silence est pesant lorsque tu t'arrêtes, tous les clients semblent tendus. tu te tournes vers le plus proche de toi. tu viens souvent dans ce boui-boui toi ? le goût est toujours aussi infect ? tu dégaine ton téléphone portable pour prendre quelques selfies. en plus la lumière est trop nulle. je me demande si y a un truc qui va dans ce café, je vais finir par mettre une mauvaise revue sur google maps, surtout si ce café n'arrive pas. tu appuies sur les derniers mots de ta phrase. en jetant un oeil narquois sur le barista. tu jettes un oeil à son nom sur son tablier. Chiba. pff. un nom de loser ça encore.

elle fait son cinéma et giichi ne peut rien faire d'autre qu'observer. elle hurle et forcément attire l'attention de tout les clients. il baisse la tête en signe d'excuse. il déteste s’abaisser devant une telle personne mais la violence ne réglerait rien sinon effrayer les autres clients. il devait rester calme et faire preuve de professionnalisme. il était celui qui rouspétait tout employé qui osait hausser le ton sur les clients trop exigeants. il fallait qu'il respecte sa propre règle. il retourne derrière le comptoir et lui prépare un café bien noir. il a les mains qui tremblent, les nerfs. cela faisait des années qu'il tenait ce café et personne n'avait encore insulté ce qu'il y servait. cette fille était haineuse sans aucune raison. elle se prenait pour la reine du monde. un faux sourire placardé sur son visage, giichi lui apporte son café. j'espère que celui-ci vous plaira. et maintenant elle critique la luminosité. putain, c'est un café pas un studio de photographie. elle sera jamais satisfaite. suivez-moi. il récupère la tasse et guide la jeune femme vers une table située près de la vitre qui donne sur la rue, là où les rayons du soleil pénètrent le plus dans le café. une fois installée, il l'abandonne de nouveau et va s'occuper des autres clients. il croise les doigts pour qu'elle ferme sa bouche mais il sait pertinemment qu'elle est entrain de chercher une nouvelle raison de se plaindre. ça se voit à la façon dont ses yeux inspectent chaque recoin. elle est surement à la recherche d'une poussière pour dénoncer l'insalubrité des lieux.