just keep on breathin ((hotaru))

What the fuck ?
What the fuck.
What the actual fuck.
Hotaru a l’impression d’être un clown. Ou un poisson rouge, à rester buggé face à la personne qu’il a vu passer devant lui y’a quelques minutes. Il l’a suivi, mais c’est son corps qu’a bougé, sans vraiment que son esprit le réalise. Eiji. Nakano fucking Eiji. Son ami. Son pote. Son bro, presque. Son ex futur beau frère. Celui qu’il pensait mort depuis huit mois. Huit mois à penser qu’il était mort. À se sentir triste de sa mort, à vouloir prendre une revanche sans savoir vers qui la tourner. Sur les Nakano, ou sur sa propre famille. Oh, il aurait pas été surpris qu’Erin tente un truc pour le buter. Au contraire, il aurait trouvé ça logique. Mais se venger de son frère parce qu'il aurait tué un pote, ça semblait pas être une idée de génie.
Il sait pas, Hotaru. C’est rare qu’il soit perdu comme ça, à pas savoir quoi faire, comment réagir. Ce matin, quand il s’est levé, il pensait vivre une vie normale. Il pensait qu’il vivrait un truc basique. Un truc simple putain. Il devait aller à l’université pour récupérer un truc pour la seule meuf du trio. Mais il s’attendait certainement pas à y croiser Eiji. Enfin. Bah non. Forcément qu’il s’y attendait pas. Il le pensait mort. Et ce qui le surprend, c’est que c’est juste ça, de la surprise. De l’étonnement. Mais y’a pas une once de colère. De pas lui avoir dit qu’il était vivant. Ni d’ailleurs une once de joie ou de soulagement. Juste de la surprise. Mais ouais, probablement que ça viendra plus tard. Peut-être. Il a pas besoin d'essayer de prévoir les trucs, il va déjà devoir les vivre, et ce sera déjà bien assez soulant comme ça. Alors quand Eiji sort de la salle où il était, Hotaru se cache. Putain, il ressemble à une ado qui stalk son crush, et ça craint. Mais il se remet rapidement à le suivre. Merde. Il marche. Il est vivant. Il est là, devant lui. Littéralement devant lui, Hotaru suit ses pas, essaye de marcher là où il a marché, comme pour le rendre plus réel. Et vraiment, qui peut lui en vouloir ? Il a pas beaucoup d’amis, Hotaru. C’est que le job de hitman est pas vraiment un travail social ou à faire à deux. Et sa personnalité extérieur aide franchement pas. Mais Eiji. Eiji, c’était un ami. C’est un ami, du coup. Peut-être que c’est toujours un ami. Il est pas mort après tout, et la dernière fois qu’ils se sont vus, c’était quand ils ont trouvé le corps d’Hana, et ils étaient encore potes à ce moment là. Le souvenir de la scène le fait presque frissonner, mais il essaye de se concentrer sur le sujet actuel. Sur Eiji. Eiji vivant.
Il finit par agir, il lui agrippe le poignet et s’il s’attend à la réaction qu’il a, il peut pourtant pas s’empêcher d’y répondre  par un rire presque sarcastique. Parce que ça semble être redondant entre eux. Le canon du flingue sur la tempe aujourd’hui au niveau de sa mâchoire, Hotaru soulève un sourcil et attend. Eiji finit par le reconnaître, à le lâcher, à lui demande s’il le suit. Mais sa phrase sonne bizarre. Hotaru regarde aux alentours, juste vérifie que personne n’a vu Eiji sortir un flingue et le braquer sur lui, ce serait con. “Ouais.” qu’il finit par répondnre. Il va pas lui mentir. Il le suit depuis qu’il est arrivé à la fac. “Mais bon. Faut pas m’en vouloir. J’ai cru voir un fantôme.” Il pose sa main sur son épaule. Il est là, palpable, vivant. Et Hotaru lâche tout sourire ou émotion qu’il y avait sur son visage. Pour le remplacer par un vide triste. “C’est que je pensais que t’étais cané.” Il l’observe, le regarde dans les yeux.
What the hell happened.
Seriously,
what the fuck.

Maintenant qu’Eiji est là devant lui, il se rend compte que de le perdre, ou de penser le perdre, a été bien plus douloureux que ce qu’il n’aurait voulu. Son ami. Seule personne qui l’ait vu s’énerver, réellement s’énerver. Qui ait vu les traits de la colère, non de la haine prendre place sur son visage. Le savoir vivant, c’est un sentiment qu’il pourrait assimiler à un calme profond, à une satisfaction surprenante. Il est pas mort. Eiji n’est pas mort. Cette histoire qui lui a pris sa soeur ne lui a pas en plus pris son ami. Son seul véritable ami. Et lorsqu’il s’en rend vraiment compte, il a presque envie de souffler jusqu’à ce que la boule de vide qui s’était installée pendant tout ce temps à la place de son ami se dégonfle et le laisse plus léger. Il sait que Erin et quelques autres des Kyudo voulaient et veulent probablement toujours sa mort. Ses mots ne le rassurent pas. Hotaru n’a aucun doute sur la capacité de son ami à échapper aux Kyudo. Mais il n’a aucune doute sur l’incapacité de son frère à lâcher ses prises. Si aujourd’hui, il sait que Eiji n’est pas mort, il n’arrêtera jamais de le pourchasser pour venger leur petite soeur. Stupide. Stupide. Pitoyable. C’est pas lui, qui l’a tué. Et si quelqu’un est à blâmer, c’est Hotaru, pour les avoir fait se rencontrer. Bien sûr, Erin est pas au courant de ce fait pour l’instant. Et Hotaru redoute le jour où ça arrivera. Un peu. Il rit, sourit, lui demande qui l’aurait tué, lui montre la fac comme ayant été l’endroit où il se cachait pendant tout ce temps. Il lui a manqué, l’idiot. Mais Hotaru ne le dit pas, regarde juste autour de lui.

C’est sa main sur son bras qui fait retourner Hotaru dans la réalité, qui le fait arrêter sa contemplation de l’endroit. Eiji ne sourit plus, et la tête qu’il tire, oh. Oh, Hotaru sait de quoi, de qui il va lui parler. Il s’excuse. Et Hotaru baisse les yeux quelques secondes avant de les relever vers lui. Il devrait pas s’excuser. C’est pas à lui de s’excuser. Lui aussi il a perdu quelqu’un d’important ce jour là. Hotaru est pas con, se doute que c’était pas encore le grand amour avec un grand A, mais ils s’aimaient bien. Hotaru en est sûr. Et quand il l’a trouvé, Eiji était avec lui. Et c’est Eiji qui a dû le calmer. Qui a dû l’empêcher de brûler l’hôtel dans lequel ils l’ont trouvé, et d’aller se venger immédiatement sur tous les Nakano (autres que lui), de la mort de sa petite soeur chérie. Il répond pas, mais son visage se couvre comme d’un voile sombre. Pas de la colère.
De la tristesse.
Un verre, qu’il lui propose. Et Hotaru se voit pas refuser. Veut pas refuser. Il hoche la tête, une seule fois. “Hm. Comme au bon vieux temps.” Et il se met à marcher. Mais il reste toujours à côté ou derrière Eiji. S’assurant toujours, à chaque seconde, de l’avoir dans son champs de vision.
C’est pas un rêve, pas vrai ?
Que c’est pas un rêve ?

Hotaru est pas quelqu’un qu’est connu pour avoir cinquante mille potes de tous côtés. Il a quelques très bons amis, dont ses deux meilleurs amis avec qui il bosse. Mais à part eux, et peut-être Kazuke. Y’a pas grand monde. C’est vite le vide. C’est pas qu’il aime être seul particulièrement, mais c’est qu’il n’aime pas assez parler avec les gens pour être réellement avec eux tout le temps. Et certainement pas assez pour aller leur parler et les voir de lui-même. Mais à une époque, y’avait Eiji. Eiji qu’il comprenait parce qu’ils faisaient la même chose. Eiji qu’il aimait assez pour lui présenter sa petite soeur à qui il tenait tant, qu’il aimait tant. Probablement la personne qu’il aimait le plus, d’ailleurs. Mais il appréciait assez Eiji pour la lui présenter. En sachant ce qu’il pourrait se passer. Qu’ils pourraient tomber amoureux. Il pensait pas que ça serait à ce point. Il pensait pas que les Nakano s'acharneraient à aller tuer sa petite soeur. Juste à cause de leur relation. Et il se sent coupable. Si coupable. Il se demande aussi pourquoi Eiji a disparu. Il se sentait coupable de sa mort  éventuelle. Mais maintenant il se sent coupable de sa disparition. Est-ce qu’il a dû partir à cause de lui et de leur amitié ? Ou à cause de lui et du faire qu’il l’ait fait rencontré sa petite soeur. Il sait pas. Mais il se sent coupable. Et pourtant, Hotaru et la culpabilité sont pas de vieilles amies. Il en a tué des gens, mis à mal des familles entières en leur retirant leur membre le plus important. Il a enlevé les père à leurs enfants, et des enfants à leurs parents. Des femmes à  leurs maris ou des maris à leurs femmes. Il ne s’est jamais senti coupable. Ce qui devait être fait devait être fait. Et c’est tout. Mais là c’était différent. Parce qu’il était celui à qui on retirait un proche. Des proches. Et c’était de sa faute. À lui.
Hotaru n’est pas sans coeur.
Il le garde juste pour ceux qu’il considère le mériter. Et Eiji a toujours fait parti de ceux qui le méritaient. Encore aujourd’hui. Probablement qu’il devrait lui en vouloir. Probablement qu’il devrait lui poser bien plus de questions sur les pourquoi du comment il est encore vivant et les pourquoi du comment il a osé faire croire à ses proches (et à lui) qu’il était mort. Mais il se rend compte bien vite que c’est pas important, c’est des détails. L’important, c’est qu’il est là. Là avec lui. Et Hotaru a franchement du mal à le réaliser. Il va enfin pouvoir être
un peu moins seul.
Eiji répond à sa proposition d’aller boire un coup, comme au bon vieux temps. À l’époque, il buvait pas d'alcool. Et Hotaru non plus. Il a jamais été un trop gros buveur après tout. Il sent le cynisme dans sa voix, et Hotaru peut pas s’empêcher de le comprendre, et de le partager. Plus ou moins. À sa différence, il est encore dans cette situation dans laquelle il doit garder ses réflexes. Mais il le comprend. Ses réflexes, ni à l’un ni à l’autre ne leur ont servi quand ils ont trouvé la dépouille de sa petite soeur. Il est amer, il est dégouté. Peut-être, probablement, qu’ils le sont un peu tous les deux. Probablement pas qu’un peu.
Ils se mettent à marcher. Ou en tout cas, Eiji marche et Hotaru le suit. Toujours derrière, toujours pour le voir. Toujours pour être certain qu’il est là. Ils finissent par s’arrêter et se poser sur un banc d’un seven eleven. Hotaru le lâche pas des yeux. Peut-être même que c’est soulant à la longue. Mais c’est plus fort que lui. Il finit par se tourner vers lui et Hotaru est un peu surpris. Il était celui qui le regardait jusque là. Ses yeux sont concentrés sur lui et ses oreilles sur ce qu’il a à lui dire. Mais ce qu’il dit n’a rien de sérieux, et ça le fait sourire, Hotaru. Un petit, léger sourire, que rares sont les personnes qui peuvent le voir. Et Hotaru suit son regard vers le Konbini derrière eux. Oui. Un Konbini c’est bien. Hotaru se lève et le regarde de haut quelques secondes en attendant qu’Eiji se lève à son tour. “Allons-y.” Il entre dans le Konbini et se prend un thé glacé qu’il paye avant de retourner s’assoir dehors. Il attend qu’Eiji l’y rejoigne avant de commencer une conversation. “Alors… T’en es où maintenant ?” Il veut savoir. Il veut s’assurer que maintenant, c’est bon.
Que maintenant il va bien.
Que désormais, il restera.